SterWen Consulting : l’informatique dédiée à la banque de financement et d’investissement (BFI)
Le 22 mars 2011
L’informatique dédiée à la BFI : rétrospective
1986 : première vague d’équipement : les applications de back-office
Dans le monde financier, l’année 1986 marque le démarrage d’une informatique dédiée à ce secteur. Pierre Bérégovoy, Ministre de l’Economie et des Finances, fait adopter une réforme en profondeur de la Place de Paris avec la création des marchés à termes, la modernisation de la gestion de la dette publique avec le statut de SVT (Spécialiste en valeurs du Trésor), l’introduction des titres de créances négociables. La même année, Londres décide de son « big bang » et ouvre le brokerage à la concurrence.
Pour tirer partie de ces opportunités, les établissements bancaires ont alors eu besoin de s’équiper sur le plan informatique. Il leur faut doter les traders d’outils d’aide à la décision (tandis que l’enregistrement des opérations pouvait se faire sur ticket-papier) et les équipes administratives d’outils de back-office à même de traiter des volumes croissants de transactions.
Les premiers progiciels apparaissent la même année. Ils sont alors dédiés aux activités de trésorerie et de dérivés de taux d’intérêt, avec un focus sur le back-office, voire la comptabilité, le système comptable central de la banque n’étant pas encore prêt pour traiter ces opérations.
1990-1995 : Seconde vague d’équipement : les applications de risk-management
La réglementation impose aux établissements une séparation des fonctions de front et de back-office, qui conduit à une segmentation de l’offre en progiciels.
La saisie et la tenue de position définissent l’application de front-office, le contrôle des risques, le règlement/livraison.
Le reporting définit le back-office tandis que la comptabilité auxiliaire se voit délocalisée à mesure que se répand l’adoption d’un interpréteur comptable tel que « règles du Jeu », édité par Sopra .
Les progiciels de front-office apparaissent dans les années 1990-1993 , notamment Summit (de Misys), Panorama (SunGard), Kondor+ (Reuters), Finance Kit (Trema).
Ces années de forte innovation financière font aussi naitre l’idée de la boite à outil logicielle (toolkit), exploitée notamment par l’américain Infinity.
Ces deux types d’offres se placent sous la bannière du « Risk Management », un terme qui s’impose dans la profession à partir de 1992.
Fin des années 1990 : apparition des applications horizontales (ou fédérales, ou transverses)
Dans les années 1990, les banques sont confrontées au besoin croissant d’une mesure centralisée de la valeur en risque (VaR) ou d’une gestion actif/passif. L’enjeu est de consolider les volumes d’encours et de flux provenant de tous les secteurs de la banque avec ceux des opérations de marché.
Les applications de front-office, à la vocation d’abord opérationnelle, voient leur périmètre se réduire sur les risques, tandis qu’apparaissent des offres horizontales sous le terme « d’entreprise risk management », aptes à traiter de gros volumes de données et se satisfaisant d’un délai de production mensuel.
Depuis 2004 – Impact de la directive MIFID
Un nouveau segment d’applications apparaît aussi avec la multiplication des plateformes de trading électronique et d’accès direct au marché, notamment depuis la directive MIFID (Article de l’auteur disponible sur Wikipedia), qui, en ouvrant l’exécution des ordres à la concurrence, a suscité la création de systèmes multilatéraux de négociation et la mise en place d’une application d’internalisation systématique des ordres (IS) chez les plus gros acteurs.
Sur les marchés d’actions la mutualisation des carnets d’ordre et l’harmonisation des protocoles de communication boursière ont conduit au remplacement de passerelles dédiées souvent développées en interne par des progiciels multi-places comme GL Trade ou Fidessa. Sur les autres marchés les outils de trading électronique, de pricing et de contribution constituent un environnement logiciel plus éclaté.
Bien que la plupart de progiciels de tenue de position savent traiter toute la palette des instruments de marché, les établissements utilisateurs ont tendance à les dédier à tel ou tel département, le change les dérivés de crédit etc…
Par ailleurs, le straight-through-processing (STP) est devenu le maître mot de cette même décennie. En conséquence les établissements ont beaucoup investi dans les interfaces entre les systèmes de front et back office, faisant évoluer leur système d’information vers un modèle en silo. L’outil de trading électronique déverse ses transactions dans le progiciel de tenue de position, de plus en plus orienté vers les fonctions de middle-office et de là vers le système de back office, l’interpréteur comptable et le logiciel de comptabilité.
Ce dispositif en silo s’appuie sur deux types d’applications transversales : les systèmes de gestion de données référentielles (Master Data Management ou MDM) d’une part, les systèmes de pilotage d’une part, qu’il s’agisse de la mesure des risques, du reporting réglementaire, du contrôle de gestion ou du calcul de la rentabilité de la clientèle.
La gestion des données référentielles
Le besoin en systèmes référentiels est né du constat qu’une gestion locale de ces données dans les systèmes de production conduisait à des redondances de tâches et des défauts de qualité des données qui se propagent dans toute la chaine de traitement. Le premier référentiel à être apparu au sein du système d’information de la banque de marché est généralement la base titres, dont la principale fonction est de fédérer et contrôler les prix de marché acquis auprès des différents data providers. La strate référentielle s’étend aujourd’hui aux tiers, voire aux portefeuilles et contrats cadres.
Le référentiel titres reste généralement le plus abouti : là où l’ISIN s’est imposé comme la norme unique d’identification des valeurs mobilières, rien n’existe pour les tiers, contrariant ainsi l’émergence d’une offre progicielle sur ce sujet et amenant les établissements à développer le référentiel tiers en interne.
Vingt-cinq ans après la naissance des premiers progiciels transactionnels, dédiés au front ou au back office, il est communément admis que tout progiciel de ce type doit savoir récupérer électroniquement ses principales données référentielles, au moins par import quotidiens de fichiers à défaut d’une alimentation au fil de l’eau.
L’asservissement aux référentiels de la banque est même le plus souvent la première étape d’un projet d’installation. Le degré d’asservissement aux référentiels reste cependant inégal au sein du système d’information (SI).
Tout en haute de la chaine STP, les outils de trading électronique, généralement conçus en service bureau, ne prévoient pour modalités d’enregistrement des références d’instruments et de contreparties qu’un chargement de fichier Excel basique à la main du trader.
Quand aux systèmes de pilotage, s’ils récupèrent les principaux identifiants des systèmes référentiels, ils gèrent encore localement un grand nombre d’attributs complémentaires, que les systèmes de production ne connaissent pas. Ainsi les outils de réconciliation par exemple des positions comptables avec les positions de gestion sont-ils quelquefois gênés par l’incompatibilité de clés analytiques assises sur des attributs référentiels non centralisés.
Systèmes de pilotage
Les systèmes de pilotage se sont également significativement étoffés depuis une quinzaine d’années, notamment sous l’effet de la pression réglementaire. Comme lors de la vague d’équipements en systèmes de production, on retrouve à peu près le même mix progiciels/spécifiques dans les choix d’implémentation. Des éditeurs ayant commencé par une offre limitée au calcul de la VaR ou au reporting de la CAD (Bâle I) ont investi ensuite les sujets Bâle II, IAS, l’ALM, les limites de crédit, la gestion transversale du collatéral et plus récemment encore la gestion prévisionnelle des liquidités à très court terme. A cet égard, les rachats d’Algorithmics par Fitch en 2005 et de Fermat par Moody’s en 2008 témoignent de l’importance accordée par ces agences de notation aux données produites par cette couche du système d’information.
Les outils de gestion documentaire du client (Know Your Customer ou KYC) et la gestion de la relation avec celui-ci (Customer Relationship Management ou CRM) sont développés en interne ou acquis auprès d’éditeurs généralistes, tel Documentum pour la fonction KYC, Siebel (aujourd’hui Oracle) dans le CRM
L’arrivée des EAI (Enterprise Application Integration)
Cet environnement logiciel qui, dans les activités de marché reste sans doute plus complexe et plus fragmenté que celui des autres secteurs de la banque, a inévitablement suscité le besoin de technologies d’échanges de flux et de transformation de message (Enterprise Application Integration ou EAI). Les flux entre applications peuvent se compter en effet par centaines, même pour une banque de taille moyenne, et l’hétérogénéité des technologies utilisées, voire la faiblesse de leur documentation, en font des sources de risque opérationnel. Un EAI, voire plusieurs, dans les plus gros établissements, ont ainsi été mis en oeuvre pour harmoniser les processus d’échange. Les objectifs de réduction des coûts de développement et de maintenance promis par les EAI n’ont pas été remplis, ou pas encore, mais ces projets ont contribué à une meilleure urbanisation du SI et permis la mise en place de modules applicatifs de surveillance de l’activité (Business Activity Monitoring ou BAM).
Années 2000 : la révolution de la bande passante
Enfin, la révolution de la bande passante, depuis 2000, en faisant dramatiquement chuter le coût du ltransport de l’information, entraine des modifications profondes sur l’informatique dédiée aux activités de marché des filiales étrangères ; la carte du SI des sites étrangers n’est plus une reproduction en miniature de celle du siège, nombre de fonctions informatiques étant soient rapatriées au siège soit mutualisées dans des hubs régionaux.
L’informatique dédiée à la BFI : perspectives
Si les applications dédiées aux marchés ont acquis la maîtrise des instruments financiers, elles peinent quelquefois à s’adapter à des workflows toujours changeants sous l’effet de la redéfinition des métiers ou la réorganisation des équipes. Les applications les plus récentes cherchent ainsi à rendre configurable l’orchestration des tâches : adapter le logiciel à un nouveau workflow par le paramétrage plutôt que par une modification du code applicatif fait économiser du temps et des coûts.
Un autre enjeu technique est d’assurer une plus grande interopérabilité entre les applications de production, soumises au STP, et des applications transverses conçues pour rendre une photographie quotidienne ou mensuelle de l’activité.
Les applications de front-office qui font aujourd’hui l’objet d’une procédure de copie de base de données, en fin de mois, à des fins de rapprochement avec les back-offices et les systèmes de pilotage, devront intégrer leur propre fonction d’arrêté mensuel pour éviter les anomalies causées par des événements à valeur rétroactive et les défauts de synchronisation entre bases.
D’autre part, et alors que la technologie de système de gestion de base de données relationnelle (SGBD/R) s’est imposée partout pour gérer les données structurées, la gestion de l’information textuelle n’est pas optimale. Les technologies de fouille de texte et d’analyse sémantique, déjà utilisées dans d’autres secteurs, pourraient être mises en oeuvre notamment dans le cadre de l’analyse-crédit, de l’analyse financière, ou dans le traitement des annonces d’OST atypiques.
Par ailleurs, le focus mis sur le service au client, ces deux dernières années, entrainera sans doute une redéfinition de la place du CRM au sein du SI, peut-être renforcé dans sa dimension proprement bancaire et financière, et rapproché de l’outil de qualification du client KYC.
Des évolutions fonctionnelles sont encore à attendre dans le domaine de la collecte de données de marché, parce que la fragmentation des marchés, déjà mentionnée plus haut, et la prise de conscience du risque de liquidité depuis 2008 nécessiteront sans doute la mise en place de mécanismes de choix de prix de valorisation selon les volumes traités par les bourses et systèmes multilatéraux en concurrence.
Enjeux à l’échéance 2020 : L’avis de SterWen Consulting
L’urbanisme informatique continuera à évoluer sous la contrainte de la recherche d’efficience opérationnelle, qu’impose la re-décomposition permanente de la chaine de valeur ; par exemple, les applications de paiement (TBF, poste SWIFT etc…) et de règlement/livraison (ESES, T2S…) quittent déjà les activités de marché pour être mutualisées avec celles qu’utilisent les autres métiers de la banque. A l’inverse, les systèmes de trading à haute fréquence ont fait irruption dans la salle de marchés.
La décennie actuelle verra sans nul doute de plus en plus de projets de regroupement en plateformes des applications assurant des fonctions de support (comptabilité, réconciliation, business intelligence…) dont les lignes métier s’étaient équipées séparément. Certaines de ces plateformes feront l’objet d’une externalisation. Quant aux applications de production, certaines d’entre elles verront leur maintenance et leur exploitation sous-traitées, dans le cadre d’une Tierce Maintenance Applicative (TMA), tandis que leur maîtrise d’ouvrage et leur maîtrise d’oeuvre resteront plus vraisemblablement à proximité des métiers, pour des raisons de complexité fonctionnelle et de risque opérationnel.
A propos de Bruno MATHIS, Manager chez SterWen Consulting
Bruno Mathis a rejoint SterWen Consulting en 2010, en qualité de Manager. Il pilote et intervient sur des missions relatives aux systèmes d’information, dans la banque de financement, la gestion d’actifs et la conservation.
Après avoir démarré sa carrière chez Arthur Andersen, Bruno Mathis a travaillé dans l’édition de progiciels dédiés à la finance (Diagram, puis Reuters Financial Software) ,puis, en 2001, s’est ré-orienté vers les métiers de l’assistance à maitrise d’ouvrage et du conseil.
Bruno Mathis est diplômé de l’ESCP.
A propos de SterWen Consulting
SterWen, créé en 1996, est un groupe indépendant de conseil en management et organisation fortement positionné sur les secteurs banque/finance et assurance/protection sociale. SterWen propose à ses clients un accompagnement sur mesure dans leurs grands projets d’évolution et de transformation, que ce soit dans des contextes de lancement d’activités, de fusions et de rapprochements, de rationalisation ou d’industrialisation, de maîtrise des risques et d’adaptation réglementaire.
L’offre de SterWen couvre du conseil en stratégie jusqu’à l’accompagnement du changement et la formation, en passant par le pilotage de grands programmes et l’amélioration de l’efficacité opérationnelle.
Son positionnement se différencie de ses concurrents par :- son pragmatisme, qui se caractérise par sa volonté d’intervenir dans l’accompagnement opérationnel de la mise en oeuvre des recommandations. – son obsession de la satisfaction clientèle ((Etude 2009 : 100% indiquent qu’ils sont prêts à recommander SterWen)
En croissance ininterrompue depuis sa création en 1996, SterWen compte environ 70 collaborateurs et réalise en 2010 un chiffre d’affaires combiné de 15 millions d’euros.
AXA, BNP Paris, Bouygues, BPCE, la Caisse des Dépôts, la Cour des Comptes, le Crédit Agricole, le GAN, GE, France Telecom, La Banque Postale, Malakoff Médéric, Natixis, l’ONU, la Société Générale, Vauban Humanis… sont quelques unes des prestigieuses références clients de SterWen.